blue solar panel

Au sujet de la vision à l’échelle nationale à moyen terme des panneaux solaires : info ou intox ?

La France est-elle en retard sur ses objectifs ? Les surfaces nécessaires sont-elles hallucinantes ? Les énergies renouvelables sont-elles un risque pour la stabilité du réseau ? Les panneaux solaires sont-ils fabriqués en Chine ? Le PV contribue-t-il à notre indépendance énergétique ? Nous répondons à ces questionnements dans cet article.

ENERGIE PHOTOVOLTAÏQUE : INFO OU INTOX ?

Mathieu Ponsot

6/14/2023

La programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit 20 GW installés en 2023, et entre 35 et 44 GW en 2028. En septembre 2021, 13,2GW étaient raccordés, soit 66% de l’objectif 2023. La France est le seul pays de l’UE en retard sur ses engagements. Le rattrapage du retard coûtera 500M€ au gouvernement français (et donc au contribuable). La France annonce qu’elle veut accélérer et changer d’échelle et développer plus de « fermes solaires ».

"Une ferme solaire, c’est du photovoltaïque sur une ferme agricole ?" Non. Cette expression vient d’une traduction littérale de l’anglais "photovoltaïc farm". Un ferme photovoltaïque est tout simplement une installation de panneaux photovoltaïques, au sol, sur un grand terrain, pour produire de l’électricité. En bon français on devrait dire une « centrale photovoltaïque ». Développer plus de fermes solaires, c’est développer plus d’installations de grande surface…

La France est en retard sur ses objectifs : vrai, malheureusement

Les surfaces nécessaires sont hallucinantes : faux

Ayons les ordres de grandeur en tête : la France à l’ambition de multiplier par 10 la puissance PV installée d’ici 2050 (annonce rappelée par le Président lors de son discours à Belfort en 2022. Multiplier le parc installé par 10 revient à atteindre 100 à 130 GW installés en 2050. La production sera alors de 160 TWh/an, soit 25% de la consommation totale d’électricité (qui sera de 640 TWh/an). Quelle surface faudra-t-il ? Si la moitié est installé sur des toitures, des parkings, l’autre moitié devra être installée au sol (c’est nécessaire pour atteindre l’objectif et pour produire une énergie très compétitive). Il faudrait donc installer 65 GW au sol ? Cela demanderait environ 60 000 ha = soit seulement 0,2% de la SAU, soit 2 millièmes des terres agricoles (La SAU totale de la France est de 29 millions d’ha). Et on ferait cela en 22 ans (d’aujourd’hui à 2055), il faudrait donc trouver 2 700 ha/an (60 000 / 22 = env 2727). Pour avoir un point de repère : C’est 10x fois moins que les terres que l’on affecte chaque année à la construction de maisons (27 000 ha par an en moyenne sur 2006-2016).

Non, la production d’une part importante de notre électricité par énergie solaire ne demande pas des surfaces hallucinantes. Nous n’aurons pas de choix cornélien à faire entre souveraineté énergétique et souveraineté alimentaire. Donc la France a raison de vouloir accélérer !

Les énergies renouvelables sont un risque pour la stabilité du réseau : faux

Pour l’instant, on fait de l’ordre de 3% du mix électrique en PV. L’objectif est de monter à 25% d’ici à 2050. Cela ne fera ne fera pas courir de risque sur la stabilité du réseau. Et c’est RTE qui le dit : RTE est le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, changé notamment d’assurer la stabilité du réseau à moyen et long terme. Par ailleurs, RTE souligne aussi, qu’il est indispensable d’accélérer le développement des énergies renouvelables pour répondre à la croissance de la demande d’électricité en France (quelle que soit la part qui serait produite par le nucléaire). Pour aller au-delà de 25%, après 2050, il faudra sans doute continuer d’améliorer nos solutions de flexibilité et de stockage. Des travaux sont déjà en cours, mais il n’y a aucune raison de ne pas accélérer jusqu’en 2050.

Les panneaux solaires sont fabriqués en Chine : vrai… tout comme nos téléphones portables

C’est vrai et c’est regrettable : avant moratoire des projets industriels étaient en préparation. Les tergiversations françaises les ont fait renoncer… Lorsque nous nous sommes arrêté les Chinois ont accéléré. Ils ont eu raison. Heureusement, ce n’est pas inéluctable : des projets de Giga Usines de production de panneaux solaires en France sont de nouveau à l’étude. C’est économiquement tout à fait possible, car le surcoût d’une main d’œuvre européenne (par rapport à la main d’œuvre chinoise) est compensé par la réduction des coûts de transport. Et on a toutes les compétences pour réussir une industrie PV en France :

  • Une R&D de haut niveau à l’INES

  • Des champions des semi-conducteur (STM)

  • Des champions de la conversion d’énergie (Schneider)

  • Des industriels du Verre Saint-Gobain

De grandes compétences en ingénierie industrielle.

Plusieurs projets de construction d’usine en France et en Europe sont en cours.

Mais alors, le PV contribue-t-il à notre indépendance énergétique ? Oui !

Il faut bien distinguer l’usine et le carburant ! Lorsqu’un panneau est installé (d’où qu’il vienne), il va produire de l’électricité là où il est installé, pendant 40 ans, sans que l’on n’ait rien à importer (ni gaz, niche charbon, ni uranium…). Le « carburant » est le rayonnement solaire. Aucun pays ne peut ne couper ce robinet-là. Donc même avec des panneaux importés, le solaire contribue à notre indépendance. Et ce sera encore plus vrai, encore plus satisfaisant, lorsque nous produirons les panneaux en France…

Donc oui, le PV contribue à notre indépendance énergétique. Ajoutons que :

  • Le PV peut se mettre en œuvre très vite si on le souhaite, au cœur des territoires

  • Le PV contribue aussi la baisse des prix de l’électricité donc au pouvoir d’achat des consommateurs et à la compétitivité de notre économie,

  • Le PV contribue à la décarbonation de notre énergie

  • Le PV peut apporter des services utiles au monde agricole

  • Le PV contribuera certainement à la réindustrialisation de la France

  • Il est urgent d’évacuer les arguments faux ou surannés et les polémiques stériles.

  • Le photovoltaïque est l’une de plus belle raison d’être optimistes face aux défis actuels :

  • Il faut que nous nous y engagions de manière unie, avec enthousiasme…